Un jour, un désir d’ailleurs vous saisit. Une envie de soleil, de ciel bleu et de capuccinos savourés en terrasse… Une envie de dolce vita, en somme. Vite, un billet pour l’Italie, vite, mettre le cap sur la riviera italienne, terre encore vierge pour nous, mais parée de mille charmes dans notre imagination !
Une nuit a suffi, un rêve (un peu agité toutefois, les wagons-lits n’étant pas aussi confortables qu’au temps de l’Orient Express…), et nous voilà à Milan, puis, après autre petit saut ferroviaire, à Santa Margherita di Lugure, « célèbre et élégante cité balnéaire ». C’est en effet toute une époque qu’on peut revivre ici, celle de la fin du XIXe siècle et du début du XXe, des grands hôtels, des touristes encore peu nombreux et élégants… Proust aurait pu y faire villégiature.
C’est la Côte d’Azur (palmiers, promenade) avec le côté dépaysant qui fait qu’on sent qu’on est bien dans la patrie de Dante : petits cafés, gelateria, nonchalance des gens à l’heure de la passeggiata…
Notre hôtel, l’hôtel Laurin nous a accueillis, affamés, dès l’heure du petit déjeuner et nous avons pu nous remettre de la fatigue du voyage dans son hammam coloré et sonorisé. Disposant d’une piscine en terrasse, ainsi que d’une belle vue sur le port, il était plutôt agréable mais manquait tout de même de classe : nous avons un peu regretté de ne pas avoir réservé au Miramar, magnifique (on y a jeté un œil).
Tout peut se faire à pied dans cette petite ville ! Nous sommes partis explorer les petites rues et sommes tombés sur une magnifique église baroque, la Basilica di Santa Margherita d’Antiochia, qui domine une volée de marches et jouxte un ensemble de villas délicieuses, dont la Villa Durazzo. Vrai coup de cœur pour celle-ci et son jardin, dans lequel les statues batifolent au milieu des fontaines. Un charmant café en terrasse permet de jouir de la beauté des lieux et de la vue sur la mer – on rêverait d’y rester des heures à lire des poèmes de Keats…
On ne peut pas faire plus romantique… Vous pouvez même y célébrer votre mariage ou, plus simplement, y assister à des concerts.
En quête de nourritures terrestres après ce petit apéritif culturel, nous avons pris place à la terrasse du bar Divino, bar à vin où les coupes de prosecco sont accompagnées d’antipasti délicieux, si bien qu’on renouvelle les unes pour avoir un nouvel assortiment des autres et réciproquement jusqu’à une heure avancée…
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« Nous traversons lentement le passage étroit qui relie à la grande mer ce ravissant port naturel, et nous pénétrons dans ce cirque de maisons couronné par un bois d’un vert puissant et frais, reflétés l’un et l’autre dans le miroir d’eau tranquille et rond où semblent dormir quelques barques de pêche.
Jamais, peut-être, je n’ai senti une impression de béatitude comparable à celle de l’entrée dans cette crique verte, et un sentiment de repos, d’apaisement, d’arrêt de l’agitation vaine où se débat la vie, plus fort et plus soulageant que celui qui m’a saisi quand le bruit de l’ancre tombant eut dit à tout mon être ravi que nous étions fixés là ».
Guy de Maupassant, La côte italienne
Arriver à Portofino (et il faut le faire comme Maupassant, en bateau, il y a des navettes toutes les demi-heures, mais de préférence tôt le matin), c’est entrer dans le rêve. Un décor de théâtre se découvre peu à peu, à mesure qu’on pénètre dans ce havre naturel, les maisons de toutes les couleurs, leurs façades peintes en trompe l’œil… On débarque chez Goldoni. Ensuite, il n’y a rien de mieux à faire que d’élire sa terrasse et de regarder passer les stars ou les puissants de ce monde. Oui, parce que Portofino, c’est un peu le St Tropez italien, et les boutiques de luxe jurent un peu avec l’ambiance « petit port de pêcheur » mais on se souvient aussi que c’était le rendez-vous favori des Rossellini, Ingrid Bergman, Clark Gable et Maria Callas… La plus belle, la grande Ava Gardner, y a résidé pendant le tournage du film La comtesse aux pieds nus de Mankiewicz.
Nous avons passé notre première nuit dans le bien nommé hôtel Eden, sorte de maison d’hôtes assez simple pourvue d’un mignon petit jardin au centre du village. Le patron est un peu bizarre et bourru, mais j’ai cru comprendre qu’en lui téléphonant (il n’a pas l’air de trop aimer Internet) on pouvait obtenir un prix (demander une chambre avec balcon, il parle français).
Le lendemain, après avoir fait un ravitaillement dans une épicerie à deux pas de l’hôtel (prosciutto, pane e fromaggio) nous nous sommes lancés dans une randonnée de trois heures jusqu’à San Fruttuoso.
Le chemin serpente d’abord au milieu des citronniers et des rosiers et longe plusieurs villas magnifiques, puis devient plus sauvage et escarpé, avec des échappées vertigineuses sur la mer. L’arrivée à l’abbaye est superbe, et même si sa visite est un peu décevante (à moins d’être passionné d’archéologie), sa position enchâssée dans une crique vaut le détour. Au bord de la plage se nichent un bar et un restaurant, et l’on peut reprendre le bateau ici pour éviter de faire le chemin en sens inverse.
De retour à Portofino, nous avons dîné à la terrasse du Strainer, au ras de l’eau et avec une vue sur le port et le village, en nous laissant tenter par le plat du jour, des pâtes aux cèpes succulentes préparées devant nous dans une meule géante de parmesan (on en aurait recommandé une assiette par pure gourmandise s’il n’y avait pas eu le tiramisu). Un chanteur nous berçait de ses mélodies sirupeuses, mais après tout, il n’y avait qu’à se laisser aller…Lire la suite : Hôtel Splendido, il paradiso
Après une matinée consacrée à la « promenade au phare » (une balade d’une heure environ, avec étape au bar gelateria avec vue panoramique), ainsi qu’à la visite du château Brown (encore une vue à couper le souffle !), au troisième jour nous étions fin prêts pour le point d’orgue du voyage, le séjour à l’hôtel Splendido.Cet hôtel mythique surplombant le village, avec ses jardins en terrasses ornées de roses et de jasmin et sa piscine qui se confond avec l’horizon, conjugue luxe et élégance.Dans notre suite, claire et de bon goût, chacune des larges fenêtres était un tableau dont nous ne pouvions détacher nos yeux… Mais nous avons également passé beaucoup de temps sur les transats savamment disposés autour de la piscine ou dans le jardin, à lire, à rêver ou à siroter des cocktails.
Le soir venu, robe de soirée et costume enfilés, nous avons dîné au restaurant gastronomique de l’hôtel en balcon sur le paysage – en regrettant seulement qu’une vitre nous en sépare, contrairement au restaurant de la piscine à l’étage en dessous, finalement plus romantique.
Ici, pas de chichis sans fin comme dans les restaurants gastronomiques français, un service discret mais attentionné qui laisse la place au plus important : les discussions sans fin les yeux dans les yeux…
Le retour sur terre s’est fait par paliers successifs pour éviter un choc trop brutal : retour au village de Portofino, déjeuner au restaurant Restaurant O Magazin (excellents spaghetti aux fruits de mer) sur le port puis trajet en bateau de nouveau jusqu’à Santa Margherita pour reprendre le train en soirée.Quatre jours, c’est peu pour un voyage, mais quand on est comblé de tant de beauté, on peut se dire : c’est assez.